mardi 26 juillet 2011

L'industrie de défense russe: un vecteur de puissance pour le Kremlin ?

Un Su27 Flanker et l'agence russe d'exportation d'armements (Crédits: Rosoboronexport)

Article rédigé par Eric Lerais

Mercredi 20 juillet 2011, le chef de l'Etat-major général russe Nikolaï Makarov a annoncé la volonté de l’armée russe de se doter de drones de fabrication nationale (1). Cette annonce est intervenue dans un contexte de contestation par le complexe militaro-industriel (CMI) des acquisitions de drones israéliens décidées par le Ministère de la défense depuis 2009 (2).

L’affaire est révélatrice des ambitions encore bien réelles des entreprises de défense russes, mais aussi de leurs limites dans un contexte de concurrence internationale forte (aucun des meilleurs drones de fabrication russe – le Tiptchak par exemple – ne correspond pour l’heure aux exigences des militaires).
Au début de l’année 2011, les dirigeants de Rosoboronexport (ROE), l’agence chargée de gérer les exportations d’armements de la Fédération de Russie, ont dressé le bilan de son activité en 2010. Le montant des exportations d’armes et d’équipements militaires s’est élevé à 8,6 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation de 16% par rapport à 2009 (entre 2008 et 2009, le montant avait déjà augmenté de 10%). De 2001 à 2009, l’indice de quantification de ces exportations a été multiplié par 2,4. Ces chiffres doivent être rapportés au fait que la vigueur économique des industries russes du CMI dépend très largement des performances effectuées à l’export : en 2004, le chiffre d’affaires des 20 premières entreprises russes d’armement dépendait pour plus de 70% des exportations.

L’industrie de Défense russe, qui fut un fleuron de l’économie soviétique durant la Guerre Froide, pèse encore d’un poids considérable en Russie, tant sur le plan politique (enjeux stratégiques, luttes de pouvoir), qu’économique (capacité à générer l’innovation, poids dans les exportations) ou sociétal (maintien de bassins d’emplois au sein de régions qui ne dispose d’aucun autre atout).
Lorsque l’on étudie les nationalités des importateurs de produits russes, on s’aperçoit que ces dernières sont en voie de diversification. Jusqu’à une période récente, la Chine et l’Inde figurait seuls en tête de liste, mais on voit émerger aujourd’hui des pays tels que le Venezuela, l’Algérie, l’Iran ou la Syrie. Le choix de ces partenaires n’est bien sûr pas sans conséquence politique, le camp occidental ayant généralement placé ces pays sous embargo (pour certains produits au moins).
L’importance historique de l’industrie de défense russe, corrélée à la nature duale et hautement stratégique de la production générée ainsi que du cadre réglementaire dans lequel elle s’inscrit, soulève plusieurs questions. D’une part, on peut se demander si cette production est utilisée à l’heure actuelle au service d’intérêts diplomatiques immédiats. A plus long terme, se pose également la question de la place qu’occupe une telle industrie dans la composition de la puissance russe. Enfin, il parait important d’identifier les acteurs et les conflits d’intérêt susceptibles d’être liés au fonctionnement du système.

Pour répondre à ces questions, nous dresserons dans un premier temps un état des lieux du CMI russe, en essayant d’en évaluer les forces et les faiblesses. Dans un second temps, nous analyserons le rôle des agences publiques de contrôle de l’industrie de défense et les intérêts personnels dont elles sont les instruments.


LE COMPLEXE MILITARO-INDUSTRIEL RUSSE, UNE TRANSITION DIFFICILE DEPUIS LA CHUTE DU COMMUNISME

On ne peut évaluer l’importance du CMI dans la puissance russe sans en évaluer les forces et les faiblesses. Or, malgré l’héritage soviétique d’une industrie structurellement imposante, il convient immédiatement d’en relativiser l’efficacité et la réalité de sa force de frappe.

Un héritage lourd à porter

Lorsque le CMI de l’ère soviétique a été aboli le 20 mars 1992, les entreprises de défense employaient encore entre 12 et 16 millions de personnes (sur une population active de 67,7 millions), mais aussi les deux tiers des scientifiques et des techniciens du pays. Toutefois, à la fin 1992, seules 25% de ces industries disposaient encore d’une réelle activité économique et en 1995, leur volume de production ne représentait plus que 8,7% de celui de 1991 (1).
En fait, il semble qu’un complexe militaro-industriel à deux vitesses ait émergé de la décennie des années 90 : de grands groupes parviennent à tirer leur épingle du jeu (Sukhoï, Almaz-Antey, Irkout…) et reçoivent la majorité des ordres de recherche et de production de l’Etat. A l’inverse, les régions les plus pauvres font preuve d’attentisme et, pour des raisons sociales essentiellement, tentent à tout prix de maintenir en vie leurs entreprises. Ainsi, la part du CMI dans l’industrie des régions est de 35% en moyenne, mais atteint par exemple 80% de la production industrielle brute en Oudmourtie (2). Pour les régions à faible budget, l’entretien de ces industries représente évidemment un gouffre financier.
Les obstacles au développement des industries de défense russes sont multiples :

• En termes d’infrastructures, seules les grandes entreprises exportatrices ont renouvelé leur matériel. En moyenne, il était estimé en 2000 que 60% des machines-outils utilisées par les entreprises de défense étaient vétustes (3).

• Le financement est également en question, avec des parts d’autofinancement beaucoup trop importantes et des bénéfices dérisoires. Cyrille Gloaguen relevait ainsi en 2003 : « Le chiffre d’affaire d’Antey, le principal fabricant russe de missiles, était en 2001 de 350 millions de dollars seulement contre 3,6 milliards pour le numéro un mondial du secteur, l’Américain Raytheon, et 2,6 milliards pour MBDA, le numéro deux. » L’importance des exportations dans les résultats des firmes russes peut également être vue comme un problème. Leur pérennité est en effet largement contestable et elles contribuent à la fabrication d’armes qui ne correspondent pas aux besoins des forces armées russes. Ceci peut s’avérer problématique si l’on adopte la vision selon laquelle les industries de défense d’un pays doivent encore aujourd’hui entretenir une relation particulière avec les troupes de ce pays et, in fine, les équiper. Cette disproportion des exportations dans l’activité des entreprises russes trouve son origine dans l’étroitesse du marché militaire intérieur russe, qui ne pourra s’étendre à nouveau qu’avec la reprise du développement économique du pays. La notion de marché intérieur est centrale dans le secteur de la défense car elle permet l’innovation et l’acquisition de savoir-faire.

• L’efficacité de la R&D : la part des brevets industriels russes ne représenterait plus que 0,3% du total mondial et la Russie ne serait plus présente que dans 1% des transactions passées sur le marché mondial des hautes technologies (39% pour les États-Unis, 30% pour le Japon).

• L’exode des cerveaux : Au cours des trois années qui ont suivi la chute de l’URSS, plus de 50% des meilleurs spécialistes du CMI auraient quitté le pays (pour les États-Unis, Israël et l’Europe, ainsi que la Chine et la Corée du Sud). Aujourd’hui, la Fédération de Russie dépense dix fois moins que les États-Unis pour ses scientifiques.

• Des IDE trop faibles : il s’agit là d’un problème à rapporter à la question du financement précédemment évoquée : les difficultés d’accès aux crédits bancaires font que les industries ne peuvent se développer seules. Et les entreprises étrangères sont limitées dans leurs ambitions par la corruption, l’instabilité juridique ou encore les limitations réglementaires qui protègent les entreprises russes pour des raisons stratégiques.

La reprise en main des années Poutine

Il faut reconnaître que l’arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir a permis de rationaliser le système de soutien aux exportations d’armement, qui ont ainsi pu décoller dans la première décennie 2000 (ce sont les grands contrats d’avions de combat remportés en Chine et en Inde). C’est ici qu’intervient la création de la société monopolistique d’exportation d’armements Rosoboronexport en novembre 2000. ROE a servi de « vecteur à la consolidation de secteurs de hautes technologies », alors que l’Etat « soutenait de grands programmes fédéraux : holding aéronautique OAK, naval OSK et projets de consolidation dans les secteurs de l’électronique, des missiles, de l’armement terrestre, permettant une renationalisation de ces secteurs jugés stratégiques ». (4)

Dans cette optique, il est vrai que le CMI russe peut être considéré comme un élément de la puissance russe, au même titre que les accords énergétiques ou les remises de dette (en mars 2011, ROE annonçait vouloir réaliser un chiffre d’affaire de 9,5 milliards de dollars en 2011, soit une nouvelle augmentation de 10% par rapport à l’année précédente).
Mais Louis-Marie Clouet, chercheur à l’IFRI et spécialiste de l’industrie de défense russe, rappelle également que l’OAK est toujours déchiré par les luttes de clans internes, que l’OSK naval est au point mort et que la consolidation du secteur terrestre n’est qu’embryonnaire. De « l’abandon des entreprises en survie artificielle » à « la consolidation des secteurs pouvant encore être sauvés », en passant par le « nettoyage des procédures d’achats d’armements et de financement de la R&D » et « la fin du mythe de l’autosuffisance » (5), le chemin est encore long pour que le CMI parviennent durablement à s’ancrer dans la division internationale du secteur de la Défense.


CONGLOMÉRATS PUBLICS : L’INDUSTRIE DE DÉFENSE RUSSE ENTRE OUTIL DE PUISSANCE ET LUTTES D’INTÉRÊTS

ROE, l’agence d’état créée en 2000, qui s’est érigée en holding à partir de 2002, a très vite été considérée comme le bras armé du Kremlin en matière d’armement, mode de concrétisation politique de la puissance du CMI russe. Les éléments allant en ce sens étaient en effet nombreux : monopole de l’agence en matière d’exportations d’armement, liens personnels entre son dirigeant (Sergueï Tchemezov) et Vladimir Poutine, ou encore reprise en main par le Kremlin des secteurs jugés stratégiques (énergie, défense...).

Pourtant, si la plupart des données de fonds restent valables, le contexte a évolué à la fin du deuxième mandat de M. Poutine (M. Medvedev est élu le 2 mars 2008), et risque d’évoluer encore si Dimitri Medvedev parvient à se maintenir au pouvoir en 2012. A la mi-septembre 2007, Vladimir Poutine a en effet cédé aux requêtes de Sergueï Tchemezov et a déposé un projet de loi portant création d’un nouveau holding baptisé Rostekhnologii . Un décret présidentiel du 26 novembre 2007 a nommé Anatoly Issaikine, ancien deputy director de ROE, directeur général de l'agence. Sergueï Tchemezov, pour sa part, s’est installé à la tête de Rostekhnologii. La création de ce nouveau holding, son rôle et son degré d’autonomie par rapport au pouvoir politique sont indissociables de la personnalité de l’homme d’affaire russe, ami personnel de l’actuel Premier ministre.

Rosoboronexport, bras armé du Kremlin et acteur industriel clef du CMI

Pour comprendre le rôle de Rosoboronexport dans le système d’exportation russe d’armements, on peut se référer à la cartographie réalisée par Louis-Marie Clouet en janvier 2007 (6) : (cliquer sur le tableau pour agrandir)






Bien sûr, en janvier 2007, Tchemezov était encore à la tête de ROE. Mais on constate immédiatement le rôle central de l’agence et son lien direct avec le Kremlin. Ses effectifs sont évalués à 2 500 personnes, dont une majorité d’anciens membres du KGB et des services de sécurité (les « siloviki »). Le poids considérable de l’agence tient, selon Louis-Maris Clouet, à la « maîtrise de l’information, l’expertise commerciale (43 représentations à l’étranger en 2006) et à la responsabilité juridique des contrats d’exportation. » (7)
En termes politique, cette influence s’est traduite par une diversification des destinataires des exportations russes : du fait de la demande croissante en matériel moderne et en transferts de technologie de la part de l’Inde et de la Chine, de la saturation de certains segments du marché chinois (aéronautique) et de la tendance indienne à formuler de plus en plus d’appels d’offre internationaux, ROE tente de pénétrer les marchés d’Asie du Sud-Est, du Proche-Orient et de l’Amérique Latine. Le Venezuela, l’Iran et l’Algérie illustrent cette évolution. Notons que tous ces pays disposent de ressources financières importantes du fait de leur rente pétrolière et gazière. Il s’agit bien sûr d’une orientation stratégique (60% des aides totales aux exportations concernent ces derniers contrats), qui n’est d’ailleurs pas restée sans conséquence : sanctions décidées par le Département d’Etat américain le 28 juillet 2006 contre ROE et Sukhoï, levées début janvier 2007 pour le groupe aéronautique mais maintenues pour l’agence d’Etat. Toutefois, il convient de nuancer la dimension « choisie » de cette diversification : les nouveaux clients de la Russie ne peuvent ou ne veulent pas acheter d’équipements d’origine européenne ou américaine. On peut donc considérer que le Kremlin se contente de répondre à une demande qui correspond aux besoins du CMI de débouchés alternatifs à l'export.
La constitution de ROE en holding industriel s'est faite dans un premier temps par le biais de la diversification vers les secteurs civils : acquisition du constructeur automobile russe AvtoVAZ à la fin 2005, prise de participation dans le capital du premier producteur mondial de titane VSMPO-Avisma (secteur des métaux spéciaux, fournisseur de Boeing, Airbus et Rolls-Royce) en août 2006. Dans un second temps, il s'est agit de prendre le contrôle (capitalistiquement ou non) de l'ensemble du secteur industriel de l'armement dans le pays et de s'imposer comme "un acteur clef des consolidations sectorielles" (Rosoboronexport étant aidé en cela par sa filiale Oboronprom) : constitution d'un monopole pour la construction des hélicoptères russes (8), rôle moteur dans de multiples projets de consolidation depuis 2006 (chantiers naval, optronique de défense, munitions…) et projet de monopole aéronautique avec OAK. Sur ce dernier point, la mainmise passe par la nomination d'un proche de Tchemezov, Alexeï Fedorov, à la tête du consortium. Notons la résistance sur ce dossier du directeur général de Sukhoï, Mikhaïl Pogossian, plus proche du cercle de Sergueï Ivanov, actuel Vice-premier ministre du gouvernement Poutine.

Tchemezov, une ambition remise en question?

Le CMI étant considéré au sein des instances dirigeantes russes (9) comme un vecteur de puissance politique et militaire, ainsi que de développement économique (l'industrie d'armement comme moteur des hautes technologies), on perçoit le rôle clef adopté par Sergueï Tchemezov dans les sphères industrielles et de pouvoir en Russie avec le développement de Rosoboronexport.
Dans ce contexte, la création du holding Rostekhnologii constitue une nouvelle victoire pour l'homme d'affaire russe. Non seulement il est parvenu à placer l'un de ses plus proches collègues (10) à sa suite à la tête de ROE, mais la nouvelle structure dont il a la charge chapeaute les activités de l'agence monopolistique hors de toute soumission à l'autorité du gouvernement: "Rostekhnologii bénéficiera de mesures exceptionnelles limitant la transparence de sa comptabilité, sa direction aura toute liberté pour utiliser les ressources financières et les bénéfices du groupe à des fins de modernisation, de concentration ou de croissance externe " (11).

Grâce au consortium nouvellement créé, Tchemezov réduit également sa dépendance aux seules exportations d’armements (auxquelles ROE est cantonnée). Cette stratégie permet de limiter les risques potentiels d’un revirement politique qui supprimerait le monopole d’ROE sur les exportations, ou d’une augmentation des budgets militaires qui limiterait les exportations. Rostekhnologii se concentrera donc sur les activités duales (civiles et militaires) à forte valeur ajoutée : haute technologie (électronique, moteurs), matières premières (métaux spéciaux), hélicoptères. Cette nouvelle configuration offre également l’avantage d’une distinction entre Rostekhnologii et sa filiale Rosoboronexport, dont les activités de vente d’arme induisent une image négative.

Sergueï Tchemezov, armé de tant de puissance et d’autonomie (et d’une Légion d’honneur décernée par Nicolas Sarkozy en mars 2010), peut-il donc se considérer à l’abri de toute menace ? Rien n’est moins sur, essentiellement à cause des choix politiques de Dimitri Medvedev et de sa volonté de « moderniser » la Russie. Il s’oppose en effet aux conglomérats publics de l’ère Poutine et à la logique de rente énergétique, préférant une économie basée sur l’innovation et les technologies de pointe. Dans un entretien au Kremlin avec les oligarques russes, en octobre 2009, il a explicitement critiqué les entreprises d’Etat dans des secteurs tels que l’armement (donc ROE), les nanotechnologies (Rosnanotekh) ou l’énergie atomique (Rosatom) (12). Durant cette réunion, le président russe à notamment évoqué une « perte de contrôle sur la création des entreprises publiques » durant les années Poutine, sa volonté de liquider les sociétés sans activité économique réelle, et la nécessité de transformer le statut juridique des conglomérats. Son objectif (au moins déclaratoire) est donc de s’attaquer à l’oligarchie économique en place, peu innovante, souvent corrompue, et plus préoccupée de se maintenir au pouvoir que de la santé économique des entreprises du pays. Mais une véritable privatisation devrait « perturber significativement les rapports de forces politiques » (13) et ne saurait être accomplie sans le soutien de Vladimir Poutine. Celui-ci laisse pour le moment le président russe incarner la campagne de modernisation, mais de multiples incertitudes demeurent, comme le rappellent des auteurs tels que Jeffrey Mankoff : liste des compagnies à privatiser, participation des acteurs étrangers à la privatisation…(14)



Il ressort tout d’abord de cette étude que le CMI russe, lorsqu’il est évalué dans sa capacité à servir la puissance de Moscou, révèle très vite des faiblesses structurelles qui ne sauraient être effacées dans les années à venir sans de profonds changements. Sa dimension pléthorique issue de l’ère soviétique, son retard technologique et ses difficultés de financement notamment, en font un secteur en pleine nécessité de réforme.
Le double-mandat de Vladimir Poutine à toutefois marqué le retour de l’Etat dans l’économie, dans des proportions sans cesse grandissantes en huit ans : identification de secteurs stratégiques, mise en avant de champions nationaux et constitution de holding par l’intermédiaire d’agences étatiques (dont ROE fait partie). Cette orientation a permis au Kremlin d’imprimer directement ses choix stratégiques au complexe militaro-industriel du pays.
Toutefois, ces choix politiques se sont accompagnés de processus d’accaparement du pouvoir par certains acteurs, dont Sergueï Tchemezov. La création du holding Rostekhnologii en 2007 s’inscrit dans cette logique.
La tendance la plus récente, néanmoins, serait celle d’une remise en cause du fonctionnement actuel par le président Medvedev, dont on réalise aujourd’hui qu’il est tout sauf l’homme de paille de Vladimir Poutine. L’exercice du pouvoir, la réalité du fonctionnement institutionnel pourraient avoir eu raison des ententes initiales et le natif de Leningrad appelle aujourd’hui à une véritable libéralisation de l’économie russe. Un tel bouleversement changerait la donne pour de nombreux « siloviki » proches de l’actuel Premier Ministre.
Gageons que l’avancée réelle des réformes dépendra en grande partie de l’évolution du rapport de force entre les deux dirigeants russes, mais également des performances économiques des conglomérats constitués ces dernières années. Or, comme le rappelle Louis-Marie Clouet dans son article précédemment cité consacré à Rosoboronexport, « les précédents exemples du capitalisme monopolistique privé ou public en Russie [ont] eu pour corollaire une augmentation de la corruption, du clientélisme et de la bureaucratie. »

Mot sur l’auteur

Diplômé de l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (Master 2 en Géoéconomie et Intelligence Stratégique), je dispose de diverses expériences professionnelles dans le secteur Défense en cabinet, dans l'industrie et au sein de l'administration. Passionné par les questions de défense (aspects politiques ou industriels), je tente d’exploiter cette culture générale au profit d’analyses sur ce secteur hautement stratégique.
Eric Lerais



Notes
(1) Ria Novosti, le 20 juillet 2011
(2) En 2009, acquisition de 48 drones du constructeur IAI pour 153 millions de dollars. En avril 2010, 15 drones supplémentaires sont achetés (source : Ria Novosti, 19 juillet 2010).
(3) Gloaguen C., Le complexe militaro-industriel russe. Entre survie, reconversion et mondialisation, Le Courrier des Pays de l’Est 2003/2, n° 32, p. 5.
(4) Ibid., p. 7.
(5) Komsomolskaïa Pravda, 16 mars 2000.
(6) L.-M. Clouet, « Industrie russe d’armement : un futur désespérément ancré dans le passé ? La très longue marche depuis l’URSS », CIRPES, Débat stratégique, décembre 2008, p.3.
(7) Ibid, p.4.
(8) L.-M. Clouet, « Rosoboronexport, fer de lance de l’industrie russe d’armement », Russie.Nei.Visions, n°22, septembre 2007, Annexe II
(9) Ibid., p.7.
(10) Divers moyens utilisés : pressions fiscales, physiques, judiciaires sur les entreprises et les dirigeants.
(11) Cette affirmation est surtout vraie du mandat de Poutine, on note un infléchissement dans la politique de D. Medvedev, d'inspiration beaucoup plus libérale.
(12) "Rosoboronexport Armed by Special Weapons", Kommersant, 27 novembre 2007
(13) L.-M. Clouet, "Rostekhnologii, vecteur dual de puissance, instrument de l'ambition de Tchemezov", CIRPES, Débat stratégique, novembre 2007, p.3.
(14) « Medvedev en guerre contre les conglomérats publics pour moderniser la Russie », AFP, 21 octobre 2009
(15) Jeffrey Mankoff, «Quelle sortie de crise pour la Russie ? » Nei.Visions, n°48, mars 2008, p.16.
(16) Ibid. p.17.

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