mercredi 8 juin 2011

L'industrie pétrolière au Brésil

Plateforme offshore de Petrobras

Généralement peu connu comme pays pétrolier, le Brésil, pays émergent, est devenu en l’espace de moins de 10 ans un acteur que l’on ne peut négliger. L’activité pétrolière représente aujourd’hui près de 10% du PIB du pays, et celui-ci est arrivé au stade de l’autosuffisance depuis Mars 2006.

LE SECTEUR PÉTROLIER EN GÉNÉRAL

L’essentiel de la production provient de puits en eaux profondes voire ultra profondes.
Le bassin de Campos, au large de Rio de Janeiro, fournit 85% du pétrole et du gaz brésilien et représente également 85% des réserves prouvées.
Cette spécialisation en forage Offshore a permis à la compagnie pétrolière phare du Brésil, PETROBRAS, de devenir technologiquement une référence mondiale en la matière, succédant les records de forage en profondeur.

L’ÉVOLUTION DU SECTEUR PÉTROLIER: DE SA NAISSANCE AU VIRAGE OPÉRÉ EN 1997

L’histoire de l’industrie pétrolière au Brésil commence à Bahia en 1858, où s’opère la première extraction de minéral bitumeux afin de fabriquer du kérosène pour l’éclairage.
En 1938, le gouvernement nationalise les richesses du sous-sol, et crée le Conseil National du Pétrole (CNP).
De 1938 à 1950, de gros efforts d’exploration sont mis en œuvre, et les politiques prennent conscience peu à peu de l’importance considérable du secteur, ce qui conduit en 1953 le gouvernement du président Vargas à conférer le monopôle de l’exploration et de la production nationale de pétrole à l’entreprise publique PETROBRAS.

Dans la logique de protectionnisme instaurée par la dictature des militaires depuis 1964, le secteur pétrolier se veut jusqu’au milieu des années 90 totalement fermé sur lui-même.
Jusqu’en 1997, le secteur sera fermé à la concurrence, et à l’arrivée de capitaux étrangers
Un seul et unique acteur agira sur le marché des hydrocarbures, PETROBRAS.
Paradoxalement, cette mentalité protectionniste, caractéristique aux dictatures d’Amérique du Sud des années 60, se veut dans le but d’arriver à l’autosuffisance du pays en pétrole.

L’autosuffisance est donc l’objectif lancé par le Brésil dès les années 50, mais jusqu’aux années 90 les moyens de protectionnisme employés ne se révèlent pas appropriés pour atteindre cet objectif.

Il faut ainsi attendre un décret du 9 Novembre 1995 pour voir apparaître un tournant dans la politique pétrolière brésilienne.

LE TOURNANT OPÉRÉ DES 1997: L'OUVERTURE DU MARCHE PÉTROLIER

Le décret du 9 Novembre 1995 puis la loi du 6 Août 1997, ont ouvert le marché brésilien des hydrocarbures (prospection, exploitation, raffinage et transport) à la concurrence.
La stratégie du Brésil est de promouvoir l’augmentation de la production nationale avec pour objectif de diminuer la nécessité d’importer du pétrole et d’atteindre l’autosuffisance dans les plus brefs délais.
La raison principale est d’éliminer ou du moins de réduire les impacts négatifs causés par les fluctuations du court mondial du pétrole, et particulièrement son augmentation.

De plus, la loi du 6 Août 1997 a mis en place un régime douanier spécial (REPETRO) d’importation temporaire de biens et de services destinés aux activités de recherches ou de production de pétrole.
Est ainsi mis en place un système de réductions des coûts par des exonérations fiscales afin d’attirer les investissements, et ainsi accélérer le développement du secteur

La loi sur l’énergie de 1997 a par conséquent mis fin au monopôle de PETROBRAS.
Les droits d’exploration et de production de pétrole et de gaz naturel appartiennent désormais à l’Union fédérale qui exerce ses droits au travers de l’agence régulatrice ANP (Agência National do Petroleo), et qui organise des ventes aux enchères des droits de concession.
En 1997 a ainsi été crée par cette même loi, l’ANP, rattachée au Ministère des Mines et de l’Energie.
La fonction de cette agence est la règlementation et le contrôle des activités économiques liées à l’industrie du pétrole.

Ainsi, PETROBRAS, première entreprise brésilienne tous secteurs confondus et 14ième compagnie pétrolière au monde, ne détient plus désormais le monopôle de l’Etat brésilien dans le secteur pétrolier.
Cette décision de destituer PETROBRAS du monopôle est l’aboutissement d’une évolution de la logique des politiques en la matière, entre 1954 et 1997.
Après avoir crée un secteur solide, un leader national puissant, le gouvernement décide par cette loi d’opérer un virage à 180° dans sa politique visant l’autosuffisance.

Cette évolution se caractérise par la prise de conscience du gouvernement, que le pays attendra un jour son objectif d’autosuffisance, non pas par des mesures protectionnistes, mais par une politique d’ouverture sur le monde, cela sur le modèle d’évolution des pays développés d’aujourd’hui, à l’époque de la Révolution Industrielle.
Ainsi, l’Etat ne possède plus que 31% du capital de PETROBRAS, tout en conservant la majorité du contrôle (55,7% des droits de vote).
PETROBRAS est selon les analystes boursiers une des meilleures, si ce n’est la meilleure valeur boursière brésilienne.

La stratégie de PETROBRAS consiste à croître :

Par diversification :

– Gaz,
– Electricité
– Energies renouvelables : L’Energie éolienne, l’Hydroélectricité de petite puissance, la Biomasse
– Biocarburant

Par internationalisation :

– En Amérique du Sud : Argentine, Bolivie, Colombie, Equateur, Pérou, Golf du Mexique
– En Afrique : Niger, Guinée équatoriale, Tanzanie, Libye, Angola

La PETROBRAS a par ailleurs signé plus de 40 partenariats avec d’autres compagnies pétrolières au cours du « round zero », afin de forer différents blocs au Brésil.

Ces « rounds » sont des ventes aux enchères organisées par l’ANP dans le but de céder des droits d’exploration et de production à de nouvelles entreprises brésiliennes et étrangères. Aujourd’hui ce sont plus d’une cinquantaine de compagnies pétrolières qui ont ainsi investi.
Les concessions ainsi achetées sous forme de parcelles de 32m² sont des concessions au sens plein du terme :
Les hydrocarbures découverts sont l’entière propriété des concessionnaires. Ils peuvent donc soit le vendre localement, soit l’exporter en toute liberté.

Cependant, la sélection des parcelles à concéder, à laquelle PETROBRAS a activement participé a été biaisé par la bonne connaissance de cette compagnie des zones riches et pauvres en hydrocarbures sur le territoire brésilien.
Ainsi, les parcelles concédées aux nouveaux investisseurs sont pour la plupart pauvres en pétrole.
Cela assure à PETROBRAS, malgré les effets de la loi de 1997 supprimant son monopôle du secteur, une domination conséquente à long terme sur l’ensemble du marché pétrolier brésilien.

Depuis 1997, de nouveaux acteurs arrivent donc sur le marché pétrolier brésilien.
Ces investisseurs sont les plus grandes compagnies pétrolières mondiales :

– Agip
– Devon
– Shell
– Chevron Texaco
– Encana
– El Paso

L’ABOUTISSEMENT DE LA POLITIQUE BRÉSILIENNE: L'ATTEINTE DE L'AUTOSUFFISANCE

Le Brésil a atteint l’autosuffisance en pétrole au courant de l’année 2006 (évaluée à Juin 2006 – Source : PETROBRAS)

Cette situation de dépassement du niveau de consommation, par le niveau de production devrait, à terme, permettre au Brésil de :

– Consolider son autosuffisance
– Exporter son pétrole
– Améliorer sa place dans la négociation sur le marché international pétrolier.

L'ancien et la nouvelle chefs de l’État brésilien, Lula et Dilma Roussef, à bord d'une plateforme offshore de la compagnie nationale Petrobras (Crédits: Agencia Brasil)

En 2010, Petrobras a enregistré un nouveau record de production, à deux millions de barils par jour. En décembre de la même année, la production moyenne de l'entreprise a même atteint 2,1 millions de barils par jour, dépassant le record d'avril dernier de 2 mbj.
Selon le groupe pétrolier, ce volume est de 6,7% supérieur à celui de décembre 2009 et de 4,4% supérieur à celui de novembre 2010. Sur l'année 2010, la moyenne quotidienne de production de pétrole s'élève quant à elle à 2 mbj.
Petrobras détient à l'heure actuelle des réserves confirmées de 14 milliards de barils de brut, lesquelles pourraient plus que tripler via l'exploitation des gisements offshore récemment découverts en mer, sous une épaisse couche de sel.
En septembre dernier, la compagnie pétrolière a annoncé qu'elle allait lever 64 milliard de dollars de capitaux frais en émettant de nouvelles actions.L'objectif : financer les onéreux investissements destinés à l'exploitation des gisements découverts en eaux très profondes (jusqu'à 7.000 m), laquelle requiert une technologie coûteuse.

DE NOUVELLES OPPORTUNITÉS

Le Président américain Barack Obama a annoncé en mars 2011 que les États-Unis voulaient devenir un important client du pétrole brésilien dès que le pays disposera d’installations en mesure d'exporter.
S'exprimant lors d'une allocution devant des chefs d'entreprise à Brasilia, le chef d’Etat américain ainsi rappelé que selon certains estimations, le pétrole récemment découvert au large des côtes du Brésil pourraient représenter pas moins du double des réserves pétrolières américaines.
"Nous voulons vous aider sur Le plan technologique et développer ces réserves en toute sécurité, et lorsque vous serez prêts à commencer à vendre, nous voulons devenir parmi vos meilleurs clients", a déclaré le président Obama.
"Et au moment où nous nous voyons rappeler combien l'instabilité dans d'autres parties du monde peut affecter le prix du pétrole, les Etats-Unis accueillent favorablement une source potentielle d'énergie nouvelle et stable", a-t-il ajouté.

Concernant son développement stratégique, Petrobras a confirmé que ses dirigeants étudiaient la possibilité du rachat de la totalité de la participation de 33,34 pc que l'italien Eni détient dans le groupe énergétique portugais Galp Energia, tout en affirmant qu'"aucune décision n'a été prise à ce jour et qu'aucun engagement contraignant ne lie les deux parties", indique la presse portugaise qui cite un communiqué du géant brésilien.

La compagnie Petrobras qui n'a pas dévoilé d'autres détails, réaffirme qu'elle étudie en permanence les opportunités d'investissement au Brésil et à l'étranger qui sont conformes aux orientations stratégiques de son plan d'entreprise.

Le pétrole brésilien a de beaux jours devant lui.

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