mercredi 8 juin 2011

Programme nucléaire indien et transferts français

Marins du premier sous-marin nucléaire indien, l'"Arihant" (Crédits: REUTERS/Savita Kirloskar)

LE PROGRAMME NUCLÉAIRE INDIEN

L’Inde commença son programme nucléaire après l’indépendance du pays, sous l’impulsion de Nehru, alors premier ministre. L’Atomic Energy Act est signé en 1948, proclamant le développement de l’énergie atomique à des fins pacifiques. Ce développement se fit avec le concours du Canada et des Etats-Unis, dans le cadre du programme « Atoms for peace » du Président américain Eisenhower.
Le facteur déterminant de la mise en œuvre de l’option militaire indienne est essentiellement lié à la défaite contre la Chine en 1962 pour le contrôle des territoires himalayens, et l’accession officielle de Pékin au rang de puissance mondiale en 1964. Les différents frontaliers entre les deux pays ne sont toujours pas réglés. De plus, la Chine est une alliée historique du Pakistan, le grand rival régional de New Dehli.

1974 est une année charnière pour l’Inde, puisque l’Atomic Energy Commission a réalisée l’explosion sous-terraine de Smiling Buddha, la première arme nucléaire indienne, à 100m de profondeur. Cet engin à plutonium assez rudimentaire fut obtenu à partir de réacteur canadien CANDU, et suite à la mise en œuvre d’une technologie indigène de retraitement. Le gouvernement indien déclara qu’il ne souhaitait pas fabriquer d’arme atomique malgré l’essai
réalisé, et que l’explosion réalisée à Pokharan était « pacifique ». New Dehli refusait néanmoins de se soumettre au régime du TNP, ainsi qu’à placer l’ensemble de ses activités nucléaires sous le contrôle de l’AIEA.
L’Inde a ensuite probablement voulu réaliser un essai dans la même zone de Pokharan, mais l’essai est abandonné car découvert par un satellite espion américain en décembre 1995. C’est finalement le 11 et 13 mai 1998 que le Premier ministre Atal Bihari Vajpayee fait procéder à deux essais tous-terrains. Le 11 mai, trois essais de bombe A sont réalisés, et deux essais de bombe thermonucléaire sont effectués le 13 mai. L’objectif de ces essais était rendre crédible l’outil de dissuasion indien auprès de la communauté internationale et particulièrement auprès de Pékin et d’Islamabad.

La doctrine nucléaire indienne revendique un non-emploi en premier de l’arme atomique, s’appuyant sur une « dissuasion minimale crédible », censée reposer elle-même sur les trois composantes aériennes, terrestres et navales.
En réalité, seule la composante aérienne paraît actuellement opérationnelle, constituée d’avions de chasse pouvant être chargé de bombes nucléaires à gravitation.
La composante terrestre repose sur différentes versions de missiles sol-sol Prithvi et Agni. Le dernier missile Agni III dispose d’une portée de 3000km, soit largement plus que le missile Shaheen-2 pakistanais (2000km) en cours de développement.
La composante navale indienne est constituée par le missile naval Dhanush, avec une portée limitée à 350km, et ne peut être lancée que depuis des navires de surface. New Dehli cherche à acquérir une capacité de frappe sous-marine, qui représenterait une capacité de seconde frappe réelle. Le missile balistique Sagarika/K-15 pourrait équiper le premier SNLE indien dès 2011.

D'assez récentes estimations (Nuclear Notebook : Indian nuclear forces, 2008 – Bulletin of the Atomics Scientists – Novembre/décembre 2008) évaluent l’arsenal indien à environ 70 têtes nucléaires assemblées, dont approximativement 50 seraient pleinement opérationnelles. Cependant, ce nombre pourrait très certainement augmenter d’ici 2020, avec l’achèvement des trois composantes. D’autre part, il reste très approximatif, étant donné que l’arsenal indien n’est pas connu officiellement avec précision, et que les vecteurs balistiques (opérationnels ou en cours de développement) de New Dehli sont à usage dual, pouvant emporter à la fois des charges conventionnelles ou des charges nucléaires.

New Dehli a procédé jeudi 9 juin 2011 dans l’Etat d’Orissa à un tir d’essai du missile balistique Prithvi-II, depuis le polygone de Chandipur. (Source: agence IANS)
Le développement du Prithvi-II fut lancé en 1983 et sa mise en service dans l'armée commença onze ans après. Long de 8,56 mètres, sa charge utile permets jusqu’à une tonne, nucléaires ou conventionnelle. De précédents tests du Prithvi-II et de son équivalent maritime, le Dhanush, ont été réalisés avec succès en mars dernier.

LES TRANSFERTS FRANCAIS VERS l'INDE

AREVA a signé en février 2009 un protocole d'accord avec le groupe public indien Nuclear Power Corp of India Ltd (NPCIL). L'accord porte sur la construction « d'au moins » deux réacteurs EPR de 1650MW thermiques de type EPR (European Pressurized Reactor), sur le site de Jaitapur, dans l'Etat du Maharashtra. Le protocole d’accord laisse l’option ouverte de la construction de six réacteurs. Le montant total de l’accord n’est pas connu, mais une porte-parole d'Areva a précisé que, sur la base de deux réacteurs, le montant de ce contrat avec l'Inde serait "clairement au-dessus" de celui de 8MD€ conclu avec la Chine en novembre 2007 pour la construction de deux réacteurs EPR.

Dans le prolongement de cet accord, AREVA avance aussi sur la mise en place de partenariats avec des entreprises locales. Ainsi, AREVA et le groupe indien Bharat Forge Ltd ont signé en juillet 2009 un protocole d’accord visant à créer une co-entreprise destinée à la construction d’un site de production de pièces forgées de grande taille en Inde. Le groupe
français a également finalisé les termes d'un accord cadre avec la société d’ingénierie filiale du grand groupe Tata, Tata Consulting Engineers (TCE), filiale du groupe Tata Sons. Enfin, la division d’AREVA, Business Unit Propulsion et réacteurs de recherche, dispose d'un bureau de représentation commerciale par l'intermédiaire de sa filiale 01dB.
Le protocole d'accord prévoit aussi la fourniture de combustible pendant toute la durée de vie de ces réacteurs. Il s’agit du premier contrat de fourniture d'uranium d'origine étrangère depuis la réouverture du commerce nucléaire entre l’Inde et le reste du monde. L’uranium naturel a été livré au premier semestre 2009 et une partie a été chargée en réacteur dès l’été de la même année.

Les autorités indiennes de sûreté nucléaire, d'après la lettre confidentielle La Lettre A, ont formé leurs propres équipes pour vérifier la sécurité du futur EPR à Jaitapur, suite à l'accident de Fukushima.

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